mercredi 20 octobre 2010

Voyage en Autriche : chasse à l’aigle à Falkenstein :

La réunion des fauconniers(*1), autoursiers(*2), aigliers(*3) et esparveteurs(*4) en Autriche fut cette année une grande réussite, comme d’habitude. La ville de Falkenstein nous accueillait pour trois jours de chasse, encadrant le jubilée du soixantième anniversaire du club Autrichien. 19 aigles royaux( Aquila chrysaetos) , 21 autours des palombes(accipiter gentilis), une quinzaine de faucons (Falco spp.) et quelques rares buses exotiques (buteo spp. et Parabuteo) sont venus de toute l’Europe essayer d’empiéter ou de lier (*5) un gibier difficile dans des conditions optimales. Le temps était constant et ni la chaleur ni le froid ni la pluie ne sont venus ternir cette réunion. Joseph Hiebeler, maître fauconnier de l’Österreicher Falkner Bund (Ordre des fauconniers Autrichiens), a organisé et préparé une vingtaine de terrains de chasse mis à disposition des fauconniers par les chasseurs locaux,tous plus fournis les uns que les autres. certes le premier jour n’a pas été favorable à notre groupe (peu de lièvres) mais les deux autres jours ont permis à toutes et tous de voler(*6) à souhait. Le vent pendant ces trois journées n’a pas été perturbant et nous avons pu voir de très bon oiseaux faire de très bons vols dans l’ensemble.

N’ayant pu suivre les groupes des autours et des faucons, je ne relaterais ici que l’expérience de la chasse à l’aigle.

J’étais accompagné de Sarembay, tiercelet(*7) d’aigle royal de trois ans. Né chez Kurt Stritll, ami de Joseph, c’est un petit aigle de 3,2 kg. Il est bien en forme mais cette année, je sens moins sa vélocité si caractéristique des années précédentes.

Le premier jour, il ne volera pas jusqu’au soir. Pas un seul lièvre n’est pris et la nervosité des oiseaux se fait sentir ; le chef de chasse nous dirige vers un petit bois dans lequel se cachent quelques chevreuils. Je sais que Sarembay les vole mais il n’a jamais pris. Je suis en poste sur une hauteur, dans un grand labour sec à 200 m de la bordure du bois. Sigrid Swhwenk, scientifique allemande de la faculté de Munich, m’accompagne ainsi que Romuald De Romans de l’Espace Rambouillet et Doris la fille de Joseph. Après plusieurs minutes d’attente, deux chevrillards sortent derrière nous en contrebas sans nous voir. Dès qu’ils nous aperçoivent, je déchaperonne Sarembay qui se couche sur mon poing et observe ; comme à l’habitude il part en montant légèrement sans conviction. Une fois au dessus des chevreuils, il revient vers nous et je pense l’attaque finie ; à peine le demi tour déclenché, il plonge en piqué sur l’une des deux bêtes. Griffé sur le dos, le chevrillard part au grand galop en montant vers la forêt. L’aigle progresse rapidement jusqu’à tenir à la tête. Le chevrillard fait demi tour et descend maintenant vers le bois traqué où il entre avec un grand fracas de branches. Il se couche et Romuald, plus rapide que moi, arrive sur les lieux pour tenir l’animal. pas moyen de le cramponner, il repart dans les ronces et les baliveaux avec Sarembay en coiffure. J’arrive sur les deux bêtes enlacées et la chevrette (nous avons pu distinguer la différence) prend la plaine à toutes jambes. A une centaine de mètres, elle s’écroule et j’arrive pour la servir… Mon premier chevreuil est enfin pris, ou plutôt, le premier chevreuil de Sarembay. Il a montré un courage inouï dans cette façon très intelligente et habituelle qu’il a en plongeant pour arriver à griffer l’animal.

Le deuxième jour, le terrain semble plus propice aux lièvres, et, rapidement, les premiers sont levés. Le champs par lequel nous avons commencé la matinée nous offre six lièvres au gite et pas un ne sera pris… C’est dans le second champs que les vols vont devenir plus incisifs. Joseph nous fait une démonstration en lançant Timor sur un lièvre à plus de trois cents mètres, il manque, se pose, et quelques secondes plus tard réclame sans sourciller. Une véritable leçon d’affaitage(*8). Raspoutine, l’aigle de Jan Nicolaus, prend deux lièvres coup sur coup. Igor, chasseur Tchèque, prend un superbe lièvre dans une poursuite de plus de quatre cents mètres. Reiner Guliash, allemand, prend un jeune lièvre, l’un des seuls jeune que nous verrons en raison du printemps désastreux qui n’a pas permis aux lièvres de se reproduire correctement (c’est la raison pour laquelle nous n’avions pas les densités auxquelles nous étions habitués). Cette deuxième journée nous offrira sept lièvres dont deux que Sarembay aura pris. Les animaux sont apportés à la cabane de chasse et quelques bouchons de cuvée “Victoire” des champagnes Martel( http://www.champagnemartel.com/fr/gamme/index.php)sont ouverts sous le regard du producteur, Jean-François Rapeneau. Les animaux sont conservés jusqu’au dernier jour dans la chambre froide du chasseur afin d’être présentés au tableau final.

Le soir du deuxième jour, l’assemblée générale du club a lieu ; cette année, elle revêt une dimension supérieure : les responsables de l’UNESCO sont présents et écoutent ce que les fauconniers demandent, inscrire la Fauconnerie au “patrimoine mondial immatériel de l’humanité”. toutes les personnalités présentes s’accordent à dire tout le travail qui a été fait par le groupe autrichien. Cette décision sera sans doute prise dans l’hiver au sein de l’UNESCO.  

Le troisième jour, nous retrouvons le terrain de la veille, mais les traques sont différentes ; les couverts de moutarde, les champs de colza, les pois, les haricots, le blé, le maïs, le sorgo, le millet, les citrouilles si célèbres ici, sont toutes ces céréales et cultures qui font une agriculture diversifiée et plaisante à chasser. Je pense que si le gibier est si abondant, c’est en partie dû à cette gestion des espaces avec une très grande communication entre agriculteurs et chasseurs. Les prédateurs sont présents : renards, fouines, belettes, chats, chats sauvages, mais en plus, par endroits lynx, pygargue à queue blanche, aigle impérial, aigle des steppes, dès qu’on va vers l’est, ours et loups. Les routes sont aussi nombreuses que chez nous et la population de lièvres est quand même étonnante. J’ai posé la question aux chasseurs qui m’ont tous dit que le lièvre ne supporte pas le dérangement et donc, ils ne font que trois battues par an. Les chats arrêts sont détruits sans vergogne, la discipline en plaine est respectée, les promeneurs savent que le chien doit être tenu en laisse où que ce soit en dehors de sa propriété. Notre système qui autorise la promenade fusil sur l’épaule toute la saison de chasse, les chiens qui courent sans autorité, les chats errants qui sont protégés, ces nuisances quasi quotidiennes pour notre capucin l’empêchent de sentir “en paix” et la population toute entière ne se sent pas bien. C’est à mon avis là qu’est notre problème : je sais qu’on me répondra “oui mais chez nous il y a des lièvres” ; combien ? 10 aux 100 ha !!! c’est déjà pas mal. En Autriche, nous pouvons croiser jusqu’à 4 lièvres par hectare !!! C’est cela qui nous motive tant à venir chasser ici et non, bien entendu, les 2300 km qu’il faut faire en voiture pour relier Falkenstein.

Ces trois journées de chasse en compagnie des meilleurs aigles européens nous ont comblé de bonheur. Certes le tableau est assez important, mais comparé aux tableaux sur les mêmes territoires en chasse à tir, il reste tout à fait acceptable : sur l’ensemble des territoires proposés que nous avons fréquentés, entre 20 et 25 000 lièvres sont prélevés annuellement ; notre réunion aura prélevé : 1 chevreuil, 66 lièvres, 17 faisans, 19 perdrix et deux corneilles mantelées.

Le repas de gala clôture cette manifestation. Les discussions sont fructueuses et les vols de la veille s’enjolivent à souhait. Encore quelques bouchons en restant sérieux toutefois, car il faut maintenant reprendre la route. Une petite nuit de sommeil, les aigles en boites, les bottes lavées, le petit déjeuner est pris et c’est l’heure du départ ; pendant que les uns se dirigent vers la république Tchèque pour une autre réunion, nous prenons la route pour 2300 km retour.

Le prochain WE, la réunion de Diakovice en Slovaquie, encadrera la réunion annuelle de l’IAF(*9).

*1 : Chasseur accompagné d’un faucon.

*2 : Chasseur accompagné d’un autour.

*3 : Chasseur accompagné d’un aigle.

*4 : Chasseur accompagné d’un épervier

*5 : Prendre avec les pieds (autours et aigles) Prendre avec les mains (faucons et éperviers)

*6 : Laisser l’oiseau partir en volant vers son gibier.

*7 : Le “tiercelet” c’est le mâle, la “forme”, la femelle.

*8 : Affaiter un oiseau : l’aguerrir au dressage sans contraintes.

*9 : International Association of Falconry.

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http://marshallradio.com/marshall-radio-telemetry-european-falconry

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